Pas besoin d’en reparler, tout le monde le sait, on était encore une fois en retard. De toute façon, ce n’est plus une surprise et je ne le prends pas non plus comme une fatalité. Plutôt comme un point d’amélioration sur lequel travailler.  Au fur et à mesure je raye donc ce qui peut être fait à un autre moment dans la journée que cinq minutes avant le départ. Bref, on a un peu couru mais il y a deux mois, il ne faisait pas si chaud alors ça va. La loge était vide, j’ai pu tirer mes chaussures et J mettre sa chemise à sécher sur le candélabre encore allumé. Enfin presque. Ambiance camping à l’opéra, j’adore. Et encore, le mot est faible pour dépeindre ce que j’ai ensuite ressenti devant la Sinfonietta, c’était plutôt comme si l’on m’avait fait découvrir un petit trésor.

C’est un fait, je n’ai jamais vraiment compris l’opéra mais les ballets…eh bien les ballets, c’est de la vie et de la musique. Et ça la musique, ça me parle. Dans la Sinfonietta, tout explose dès l’entrée. Du vide et de l’obscurité, ils ont recrée l’univers. A peine les lumières éteintes, un bang de cuivres fait jaillir et tourner les danseurs. Et sursauter les spectateurs. C’est un instant seulement de surprise mais il fait basculer toute mon attention du côté de la scène. Sur les planches noires, les couples se forment, s’envolent, s’attachent et se mélangent avec énergie et panache. La symphonie les fait vivre, elle les fait sauter, courir, s’enlacer puis mourir.

Vingt quatre minutes ont passées. Une parenthèse de grace volée à la réalité. Un instant qu’aucune montre ne pourrait réellement chronométrer tant il est plein d’opposés. Lourd d’une entrée en fanfare, la symphonie composée par Janacek se fait plus subtile passant d’une danse de village à l’ambiance romantique d’un monastère. Les danseurs passent en un jeté d’une scène à l’autre sans même paraitre remarquer qu’ils promènent avec eux plus d’un spectateur captivé. Vingt quatre minutes ont passées comme ça. Comme sur un fil tendu entre ici et là où il est facile de se balancer sans avoir peur de perdre pied. Elles sont passées presque en un claquement de doigts. Juste comme ça, finalement à peine le temps d’un simple entrechat.

dans le sac de claire - dans mon sac de danse - la sinfonietta de janacek - derbie repetto en cuir noir verni avec le roman de murakami 1Q84 vue de dessus en sortant de l'opéra de Nice

Pure coincidence, j’ai trouvé 1Q84 d’Haruki Murakami en arrivant près de Sanur, sur Bali. Les références à Janacek et à la Sinfonietta qu’il a composé se retrouvent environ toutes les vingt pages. Ma perspicacité hors norme m’a permis de faire le rapprochement avec le ballet que l’on avait vu à l’opéra deux tomes plus tard. Soit un équivalent de neuf cent pages et quelques cent vingt références. La tache de chocolat sur la tranche vient du petit déjeuner, c’est évident. Bref, j’ai adoré et j’en reparlerai.