Treize heures de vol, je crois que ça fait quelque chose comme six films ou 8 repas ou environ 32000 mots prononcés sans vraiment s’arrêter. Ou alors une grosse nuit de sommeil avec des rêves en pointillés. Enfin, dans l’avion, c’est plutôt une succession de courtes nuits (ding, turbulences / ding, repas / ding, toilettes / ding, le voisin qui joue des castagnettes) avec de brèves incursions dans un long rêve éveillé. Comme je n’arrive pas à apprécier un film tout en parlant et en mangeant, j’ai opté pour la seconde option; un long voyage en rêvant aux semaines passées.
L’avion, c’est une sorte de bruit blanc en continu. Les pensées se forment sans s’arrêter, volent, se transforment et s’évanouissent me faisant tour à tour bailler ou sourire avec délice. Alors dans ces conditions, deux vols longs de 13 heures c’est un peu comme deux parenthèses. Une que l’on hésite d’abord à ouvrir mais qui ne finit plus de s’étirer une fois entamée et l’autre que l’on ne referme jamais vraiment. Comme une syntaxe un peu bancale rendant soudain tout plus rythmé. Moins parfait. Plus vivant.
Depuis les rues de Thaïlande chargées d’épices aux plaines volcaniques de l’Indonésie parcourue à dos de moto (vue le nombre de bosses, on aurait pu croire à un chameau), chaque instant passé entre ces deux vols est déclencheur d’autant de rêveries intense aux titres racoleurs:
- nager avec les raies à Komodo
- passer le clair de lune sur la plage d’Amed
- se perdre dans la brume de Mae Sai
- rouler en riant sur le triangle d’or
- surfer sur le spot de Dun Dun à Gerupuk
- manger du caramel au beurre salé avec des fourmis
- circuler à vélo entre les éléphants à Ayuthaya
- chanter frère Jacques avec les enfants de Kampung Komodo
- regarder le coucher de soleil à la frontière Birmane
- déambuler dans le marché d’Ende
- goûter les mangues sucrées entre les ruines de Sukhotai
- contempler le soleil se lever sur les lacs du Kelimutu
Bref, plus qu’à tout coucher sur papier et cette fois sans parenthèses. Ou presque.