6h30 – le réveil sonne, c’était pas vraiment prévu. C’est plutôt le réveil de la semaine ça. Je me rendors sereine bien au chaud sous la couette.

9h30 – le réveil sonne de nouveau, c’était pas non plus prévu comme ça puisque j’avais rendez vous à 9h30 sur place.

9h35 – le café est passé mais la brioche est restée. Je reste positive. Le ciel est bleu, les planches de surf rentrent encore dans la voiture et j’ai posé une demi baguette avec trois carreaux de chocolat sur ma combinaison.

9h36 – Manque d’habitude, j’ai failli arracher trois rétros en reculant. Les planches m’empêchent de voir tout le coté droit de la route. Pas grave. Les voitures que je ne vois pas, n’existent pas. On fait comme au permis, on a dit.

9h59 – Quelques vagues et des surfeurs attendants comme autant d’otaries. Les autres sont là. Aucun n’est changé sous prétexte qu’il fait froid. Je leur dit que c’est n’importe quoi, enlève mon haut et éternue deux fois. Ok, donc l’eau à 12 degrés, c’est surement aussi vrai.

10h15 – Les quelques degrés gagnés lors de l’échauffement sont réduits à néant. Malgré les croyances, mettre les pieds dans l’eau est hyper facile car on ne les sent plus. Ce qui est dur au surf en hiver, c’est la tête. Sans vraiment le vouloir, je la passe sous l’eau et comprend en la ressortant ce qu’avoir froid veux dire. Le vent et l’eau sur mon visage. J’ai l’impression d’avoir perdu ma mâchoire. Ça va, tous les ans, je prends la même leçon mais j’ai tendance à rapidement oublier les choses désagréables. Allons plutôt ramer pour se réchauffer. Beach break, j’aime ça. Une vague sur du sable, ça me plait, on tombe et c’est encore doux si on touche quelque chose. Le seul truc, c’est la barre à passer.

10h17 – La planche me porte toujours et je sens sous mes mains le contact familier de l’eau. La rame est encore agréable, j’ai froid mais je déborde d’énergie. Un peu comme si j’étais désormais branchée. Sous tension. Je crois que ça a rapport avec le fait de se retrouver perdu au milieu des éléments. Comme si nos choix se trouvaient limités à leurs bon vouloir. Comme si, finalement, il ne nous restait plus qu’à accepter notre situation et à profiter de chaque vague, chaque occasion. Aussi proche de l’eau et du vent. À moitié noyée et frigorifiée, j’ai une conscience aiguë de mon corps et de tout ce qui se passe à côté. Je me sens vivante et j’adore ça.

10h20 et 10h22 – Je rame mais impossible de décoller. Saleté de surf.

10h23 – Pareil mais en mieux. Ça part sans accrocher. Bon, je suis frustrée mais pas désespérée. Pas encore.

10h25 – Tous sont partis sur celle d’avant. Bien trop énorme pour mes jambes, je dois avouer. Celle-ci est juste pour moi. Bon endroit, bon moment. J’ai le tempo qu’il faut. Quelques secondes où tout s’accorde. Quelques petites secondes pendant lesquelles, la planche, la vague et moi dessus sommes presque en phase. Ensemble tout simplement. Puis je me lève et trace une ligne sur la droite. Pas de virage compliqué ni de saut, juste le plaisir de glisser.

10h30 – Pause. Avaler ces kilomètres à la  piscine m’aura servi jusque là. J’ai mal aux épaules mais mon coeur rebondit toujours tranquillement dans ma poitrine. Par contre, je ne sens toujours pas mes pieds. Je fait passer de l’eau douce dans ma bouche. J’avais oublié le goût. Vu comme ça me plait, j’en profite pour rincer tout ce qu’y est un peu trop salé. J’ai presque envie de rester à profiter du spectacle assise là. Sur le sable. Deux minutes, encore et regarder ne suffit plus. Il faut que je retourne à l’eau, que j’essaie de repasser la barre. Il faut que je me retrouve à ramer juste là bas, que je reparte glisser.

11h05 – Le tout doux beach break du début de session s’est un peu transformé en shore break et je dois avouer que je ne l’ai pas vraiment vu passer. C’est drôle mais pas drôle. Le détour a faire est grand et je suis fatiguée. Pas grave, j’ai déjà du sable dans ma combinaison et mon maillot. Je me rappelle simplement de faire attention à éviter la planche si je me perds dans le bouillon car j’ai encore la trace de la dernière fois sur le front.

Je ne vous raconte pas le passage dans la machine à laver en revenant. C’était surement plus drôle vu de la plage mais pas de mon point de vue alors voilà, je passe dessus.

En parlant de la plage, au Fort bloqué, elle est superbe. Sauvage et pratique. Bon, on a tous une vision un peu différente du luxe mais quand beaucoup vous diront que le top c’est de siroter un mojito dans la piscine du 3.14 de Cannes. Je vous parlerai  plutôt de la douche d’eau douce que l’on trouve sur la plage du Fort tout près de la route du Loch. Et ça, après une session salée, c’est le paradis.

Ça, l’odeur de wax typique du retour de surf, le chauffage de la voiture à fond et la playlist Roadtrip (Bestcoast, Wild Nothing, Lotus Plaza, Milky Chance, The Heartless Bastards, LP…) que je me suis faite pour la route jusque la maison.